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EssilorLuxottica : une entreprise tech ?

#85 La prochaine star du CAC 40 ?

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Loris & Abdallah

📆 Cette semaine, c’est enfin le retour de la saison des résultats qu’on attend avec impatience dans le Club. Pour le moment, nous suivrons surtout des entreprises américaines comme TSMC, UnitedHealth ou BlackRock.

EssilorLuxottica : une entreprise tech ?

EssilorLuxottica est le leader mondial de l’optique, un secteur porté par des tendances structurelles solides telles que le vieillissement de la population ou l’utilisation intensive dans nos vies quotidiennes.

Le groupe est le fruit de la fusion entre deux géants : le français Essilor, numéro un de l’optique ophtalmique et l’italien Luxottica, leader des montures, notamment avec des marques emblématiques comme Ray-Ban et Oakley.

Performance annualisée de 11.4% sur 10 ans

Aujourd’hui, le partenariat stratégique avec le géant américain Meta a renforcé la perception du groupe franco-italien comme une entreprise technologique outre-Atlantique, entraînant une revalorisation significative de l’entreprise.

Pour cette raison, l’action a connu une des meilleures performance du CAC 40 en 2024 (+30%) malgré les difficultés du marché boursier français.

Dans cette newsletter, nous allons analyser cette entreprise : son histoire, son business model, ses avantages compétitifs, ses perspectives et ses risques. Nous terminerons comme d’habitude par la valorisation.

C’est parti ⤵️

L’histoire d’EssilorLuxottica

EssilorLuxottica est né de la fusion en 2018 d’Essilor, entreprise française et leader mondial des verres optiques et Luxottica, leader mondial des montures de lunettes.

A gauche, Hubert Sagnières, patron d’Essilor et Del Vecchio à droite en 2017

Je vais donc revenir brièvement sur l’histoire de ces 2 entreprises.

Essilor

Essilor est né en 1972 de la fusion entre deux entreprises françaises : Essel et Silor.

Essel, fondée en 1849, a débuté comme un réseau d’ateliers parisiens spécialisés dans l’assemblage de lunettes, avant de se diversifier dans la fabrication de montures, puis de verres. Silor, fondée en 1931 par Georges Lissac, s’est, quant à elle, concentrée sur le développement de matériaux et traitements innovants pour les verres optiques. Leur fusion a combiné l’expertise d’Essel dans les montures avec les innovations technologiques de Silor, permettant à Essilor de s’imposer comme leader mondial des verres optiques.

Entre 1990 et 2013, sous la direction de Xavier Fontanet, Essilor s’est recentré sur ses points forts.

Xavier Fontanet - PDG entre 1990 et 2013

Au début des années 90, l’entreprise était présente sur plusieurs segments : les verres, les montures, les lentilles et les implants intraoculaires. Toutefois, en dehors des verres optiques, Essilor occupait une position de challenger. Dans le même temps, Xavier Fontanet a pris une décision stratégique en recentrant l'entreprise sur le secteur des verres, consolidant ainsi sa position de leader dans ce domaine.

Dans les années 90, trois choix stratégiques majeurs ont façonné Essilor :

  1. Investir massivement dans les verres progressifs (utilisé notamment pour la presbytie)

  2. Se concentrer sur la conquête du marché américain

  3. Utiliser intelligemment le levier de la croissance externe

Cette stratégie a été un véritable succès, consolidant Essilor comme leader incontesté du secteur. L’entreprise a même poussé à la faillite son concurrent australien, Sola Optical, qui a ensuite été racheté par Carl Zeiss suite à un veto des autorités de la concurrence à une acquisition par Essilor.

À la fin des années 2010, juste avant sa fusion avec Luxottica, Essilor détenait environ 42% du marché des verres correcteurs, loin devant ses concurrents directs : Hoya et Carl Zeiss, qui se partageaient ensemble 20 % du marché.

Je vais m’arrêter là mais si vous voulez plus loin, je vous recommande ce podcastXavier Fontanet revient pendant plus d’une heure sur son passage chez Essilor. Sinon, pour aller encore plus loin, il y a son livre Conquérir le monde avec son équipe : la fabuleuse histoire d’Essilor (1990-2013). Je ne l’ai pas lu mais le livre fait partie de ma liste de lecture cette année !

Luxottica

De son côté, l’italien Luxottica a une histoire bien plus récente mais tout aussi captivante !

Fondée en 1961 par Leonardo Del Vecchio, l’entreprise est née de la vision d’un homme issu d’un milieu très modeste, ayant grandi dans un orphelinat. À seulement vingt ans, Del Vecchio crée son propre atelier de fabrication de montures de lunettes. Dès le départ, il perçoit l’importance stratégique de l’intégration verticale pour maîtriser l’ensemble de la chaîne de valeur.

Si le nom de Leonardo Del Vecchio ne vous est pas familier, sachez qu’il est une véritable légende en Italie. C’était l’un des hommes les plus riches du pays jusqu’à son décès en 2022 et il est surtout un symbole du miracle économique italien post Seconde Guerre mondiale.

Leonardo Del Vecchio - Fondateur de Luxottica

Le véritable tournant pour Luxottica a lieu en 1988, lorsque Del Vecchio perçoit que les lunettes ne sont plus de simples objets médicaux, mais deviennent des accessoires de mode. Il est le premier à signer un accord de licence avec une marque de luxe, Armani, en 1988.

Evidemment, il ne pas s’arrêter et multiplie les partenariats avec Prada, Chanel, Bulgari, Ralph Lauren, Michael Kors, Versace, Tiffany

En 1999, Del Vecchio réalise un coup de maître en rachetant Ray-Ban, une marque alors en déclin. Il la relance pour en faire la marque emblématique qu’on connaît aujourd’hui.

L’acquisition qui a tout changé pour Luxottica

Cependant, son style de management autoritaire complique la gouvernance de l’entreprise. Après une première retraite en 2004, il revient aux commandes une décennie plus tard, tout en conservant plus de 30 % du contrôle de Luxottica. Entre 2014 et 2015, il illustre ses exigences en remplaçant trois PDG en seulement 17 mois.

L’intégration verticale reste au cœur de sa stratégie. Fusionner avec Essilor devient rapidement une priorité car environ 30 % des verres utilisés par Luxottica proviennent du fournisseur français.

Modèle d’affaires

EssilorLuxottica est une entreprise verticalement intégré, ce qui lui permet de contrôler toute la chaîne de valeur, de la production à la distribution. L’entreprise combine la production de verres (héritée d’Essilor) et celle de montures (héritée de Luxottica) et possède des chaînes d’opticiens qui lui permettent de distribuer ses produits directement aux consommateurs finaux.

Présente sur tous les continents, EssilorLuxottica présente ses chiffres en fonction de ses 2 canaux de distribution :

  1. Direct to Consumer (DTC) : vente directe aux consommateurs finaux.

  2. Professional Solutions : vente en gros à destination des professionnels, comme les opticiens et les optométristes.

Le graphique issu du dernier rapport annuel illustre clairement le fonctionnement de leur business model ⤵️ 

Verres correcteurs

Avant la fusion, les verres correcteurs représentaient environ 90% des revenus d’Essilor. L’entreprise conçoit, fabrique et personnalise des verres pour répondre aux besoins visuels de chacun, et son large portefeuille de marques renforce sa position dominante sur ce marché. Parmi les principales marques d’EssilorLuxottica :

  • Varilux : pionnier des verres progressifs depuis 1959 grâce à Bernard Maitenaz, Varilux propose des verres qui offrent une transition fluide entre la vision de près et de loin, répondant aux besoins des personnes de plus de 40 ans.

  • Crizal : une révolution des années 90 en matière de confort visuel. Les verres Crizal réduisent les reflets et améliorent la résistance et la durabilité des verres. Ces technologies offrent une protection complète contre les rayures, salissures, poussière, eau, rayons UV et reflets.

  • Eyezen : lancée en 2015, ses verres sont conçus pour répondre aux besoins visuels spécifiques des utilisateurs d’appareils digitaux.

  • Barberini : depuis 1963, cette marque est une référence dans les verres optiques haut de gamme, reconnue pour la qualité exceptionnelle de ses produits.

Montures

Avant la fusion, Luxottica se concentrait sur la production de montures pour lunettes correctrices (40%) et non correctrices (60%).

EssilorLuxottica possède un portefeuille impressionnant de marques propres, toutes acquises sous la direction de Leonardo Del Vecchio, à l’exception de Luxottica :

  • Luxottica

  • Vogue Eyewear (1990)

  • Persol (1995)

  • Ray-Ban (1999)

  • Oakley (2007)

  • Oliver Peoples (2007)

  • Alain Mikli (2013)

En plus de ces marques, l’entreprise bénéficie d’accords de licence avec des marques iconiques, notamment : Chanel (1999), Prada (2003), Versace (2003), Dolce&Gabbana (2006), Ralph Lauren (2007), Michael Kors (2015) ou encore Brunello Cucinelli (2021), dont on parle régulièrement dans le Club.

Le fonctionnement de ces partenariats se fait sur la base de royalties représentant environ 5 à 15 % du prix de vente au détail pour les marques.

Ces accords de licence sont signés pour une durée déterminée. Par exemple, l’accord avec Prada devait se terminer le 31 décembre 2025. Il a été renouvelé pour 5 ans le mois dernier.

Bien que ce soit peu fréquent, il arrive que certains partenariats ne soient pas renouvelés. Par exemple, c’était le cas avec Bulgari en 2023 alors que cette marque travaillait avec Luxottica depuis plus de 20 ans.

Distribution

EssilorLuxottica s’appuie sur deux principaux canaux de distribution : Professional Solutions (PS) et Direct to Consumer (DTC). En 2023, PS représentait 48 % du chiffre d’affaires et s’adresse à plus de 300 000 professionnels (opticiens indépendants, plateformes de e-commerce, etc.). Ce segment repose sur un réseau de partenaires solide, particulièrement bien implanté en Europe et en Amérique du Nord.

Le segment DTC représente 52 % du chiffre d’affaires en 2023 et constitue un pilier essentiel du modèle économique du groupe. Ce réseau de distribution en propre s’appuie à la fois sur des magasins physiques et des plateformes e-commerce.

L’intégration de la distribution dans la chaîne de valeur fait partie de l’ADN d’EssilorLuxottica, et ce bien avant leur fusion. Luxottica, en particulier, s’est distinguée par sa stratégie d’acquisitions. En 1995, l’entreprise italienne a racheté LensCrafters, l’un des plus grands distributeurs d’optique aux États-Unis, suivi par d’autres acquisitions stratégiques comme Sunglass Hut.

Au 31 décembre 2023, EssilorLuxottica exploitait 13 366 magasins en propre et 4 223 magasins franchisés, soit un total de plus de 17 500 points de vente dans le monde.

En France, le groupe possède des enseignes bien connues comme GrandOptical et Générale d’Optique pour l’optique, ainsi que des marques spécialisées dans les lunettes solaires et non correctrices, telles que Ray-Ban, Sunglass Hut, Oakley, et Solaris.

En 2019, EssilorLuxottica a acquis GrandVision, leader mondial de la distribution d’optique, pour 7,1 milliards d’euros. Après une longue intégration, cette acquisition a consolidé la position du groupe notamment en Europe, où GrandVision détient environ 75 % de son réseau ainsi qu’en Amérique latine.

Article du 31 juillet 2019 - Source : Les Echos

Il ne faut pas non plus oublier le e-commerce, qui fait partie intégrante de la division DTC. En 2023, il représente environ 7 % du chiffre d’affaires total du groupe, soit environ 15 % de la division DTC. Ce canal inclut des sites des enseignes physiques comme ceux d’Oakley, Ray-Ban et Sunglass Hut ou LensCrafters.

Paysage concurrentiel

Le paysage concurrentiel d’EssilorLuxottica s’analyse sur ses deux principaux domaines d’activité : l’optique et les montures.

Optique

L’industrie des verres correcteurs est largement dominée par trois acteurs : EssilorLuxottica, Carl Zeiss et Hoya, qui captent ensemble environ deux tiers du marché, laissant le reste très fragmenté.

Cette position dominante offre un avantage stratégique essentiel, comme le soulignait Xavier Fontanet. Être leader permet de maintenir des coûts de production compétitifs et de diluer l’impact des dépenses en R&D sur le chiffre d’affaires.

En 2023, EssilorLuxottica a investi 600 millions € en R&D, contre 350 millions pour Carl Zeiss. Cependant, ce chiffre représente 16,7% du chiffre d’affaires chez Carl Zeiss et seulement 2,3% pour EssilorLuxottica. Ce différentiel illustre l’avantage d’échelle dont bénéficie EssilorLuxottica, capable d’investir massivement tout en préservant ses marges.

L’investissement dans la R&D est une force historique d’Essilor, qui a notamment retrouvé sa position dominante grâce à des innovations comme les verres Cryzal dans les années 1990. Aujourd’hui, avec la fusion avec Luxottica, ce leadership est renforcé. Luxottica favorise les verres Essilor pour ses montures, consolidant leur avantage concurrentiel grâce à un “écosystème” complet.

Je pense donc qu’il est peu probable qu’un concurrent menace la position d’EssilorLuxottica sur le marché à court ou moyen terme.

Cependant, un nouvel acteur a récemment émergé : Warby Parker, fondé en 2010.

Initialement, cette entreprise voulait disrupter l’industrie de l’optique en à tirant les prix vers le bas grâce à une intégration verticale et une distribution en ligne.

Malgré un début prometteur, deux obstacles sont vite apparus :

  • Des prix trop bas peuvent susciter de la méfiance, surtout pour un produit aussi essentiel que les lunettes.

  • Près de la moitié des ventes de lunettes, en valeur, sont réalisées auprès de clients âgés de plus de 55 ans, un public difficile à toucher uniquement par une présence en ligne.

En réponse, Warby Parker a développé un réseau de magasins physiques à partir de 2013, atteignant aujourd’hui plus de 250 points de vente. Mais cette stratégie coûteuse les maintient dans le rouge. Pour compenser, ils ont progressivement augmenté leurs prix et se sont “premiumisés”, abandonnant complètement leur stratégie initiale.

Même si Warby Parker continue de croître, je vois difficilement comment ils pourraient sérieusement menacer EssilorLuxottica. Surtout, cela montre à quel point ce marché mature est difficile à faire bouger, ce qui me conforte dans l’idée que la position dominante du groupe franco-italien est très compliqué à attaquer.

Montures

Depuis des décennies, Luxottica domine l’industrie des lunettes. Son modèle repose sur une stratégie simple mais terriblement efficace : offrir une solution clé en main aux maisons de mode pour conquérir le marché des lunettes.

Avec son expertise en fabrication, sa R&D avancée et son réseau de distribution mondial, Luxottica permet aux marques de se lancer sans investir dans des infrastructures coûteuses. En échange, elles perçoivent des royalties de 5 à 15 % sur les ventes, pendant que Luxottica maximise leur visibilité et leurs revenus.

De nombreux exemples témoignent de l’efficacité de ce modèle. Armani, après avoir quitté Safilo pour Luxottica en 2013, a vu ses ventes augmenter de 30 à 50 %. Dolce & Gabbana, Ralph Lauren ou encore Prada ont également bénéficié de cette stratégie, qui reste le socle du succès de Luxottica. Pourtant, ce modèle autrefois indiscutable est désormais remis en question.

Depuis quelques années, les acteurs du luxe cherchent à s’affranchir de leur dépendance à Luxottica.

LVMH a envoyé un signal fort en créant Thelios en 2017, sa propre division de lunettes. En 2023, Bulgari, une marque phare de LVMH, a quitté Luxottica après 26 ans de collaboration pour rejoindre Thelios.

En septembre 2023, Thelios a ajouté l'emblématique marque Vuarnet à son portefeuille, suivie de la marque Barton Perreira, en novembre 2023.

De son côté, Kering a adopté une stratégie similaire en lançant Kering Eyewear en 2014. Aujourd’hui, ce nouvel acteur réalise un chiffre d’affaires 1,5 milliards € (pas mal pour une division qui n’existait pas 10 ans plus tôt). Cela représente environ 8 % des revenus de Luxottica. Surtout, Kering Eyewear connait une croissance impressionnante (35% en 2023 et 10% en comparable).

Certes, cela a été rendu possible grâce à l’internalisation de la production des montures des marques du groupe (Gucci, Saint Laurent, Bottega Veneta, Balenciaga). Cependant, Kering produit aussi des montures pour des marques externes au groupe (Cartier, Montblanc, Chloé…)

Le luxe a toujours cherché à garder un contrôle total sur son image et ses produits. En internalisant la production de lunettes, des groupes comme LVMH et Kering assurent une cohérence parfaite entre leur vision et leur stratégie.

Luxottica conserve des atouts considérables avec son réseau mondial et son expertise inégalée. Mais les initiatives de LVMH et Kering montrent que le modèle des licences est aujourd’hui challengé.

Quels avantages concurrentiels pour EssilorLuxottica ?

Avant d’investir dans une action, il est essentiel de comprendre ses avantages concurrentiels. Dans le cas d’EssilorLuxottica, je vois 3 éléments.

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Loris & Abdallah

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