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-15% sur Ferrari : excès ou retour à la réalité ?
#140 Notre synthèse du Capital Market Day 2025 de Ferrari
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-15% sur Ferrari : excès ou retour à la réalité ?
Par Loris Dalleau
Ce jeudi matin, Ferrari tenait son Capital Market Day, un événement majeur où la marque au cheval cabré a dévoilé ses ambitions pour 2030. Un moment attendu, tant par les investisseurs que par les passionnés d’automobile.
La réaction du marché ne s’est pas fait attendre. Le titre a plongé de plus de 15% dans la foulée de la présentation. Une sanction brutale pour une entreprise souvent perçue comme l’incarnation même de l’ultra-luxe.

Alors, que s’est-il passé ? Les objectifs annoncés étaient-ils vraiment décevants ou le marché a-t-il simplement manqué de perspective ?
C’est que nous allons voir dans cette newsletter👇
2014 - 2024 : difficile de faire mieux
Avant de se projeter vers 2030, il faut rappeler à quel point Ferrari a connu une trajectoire remarquable depuis son introduction en Bourse en 2016. En effet, son chiffre d’affaires a progressé à un rythme moyen de 10% par an, tandis que le résultat opérationnel a crû encore plus vite, autour de 16% par an en moyenne.
Résultat : la marge opérationnelle est passée de 14,1% en 2014 à plus de 28% en 2024, faisant de Ferrari le constructeur automobile coté le plus rentable au monde.

Marge opérationnelle entre les constructeurs
En parallèle, Ferrari a doublé le nombre de véhicules livrés depuis 2014. Malgré tout, nous restons relativement prudent sur cette métrique car la croissance doit être maîtrisée pour conserver la désirabilité et l’exclusivité de la marque. Ainsi, nous estimons que cette croissance du nombre de livraisons devrait réduire par rapport à la décennie précédente.

Nombre de livraisons depuis 2014 - Fiscal.AI
C’est pourquoi la priorité n’est pas le volume, mais le prix moyen par véhicule. Celui-ci n’a cessé d’augmenter, soutenant mécaniquement la marge opérationnelle.
L’arrivée de la F80, facturée 3,6 millions €, devrait encore renforcer cette tendance. À ce rythme, le prix moyen par véhicule pourrait dépasser 500 000€ d’ici 2027.

Croissance maîtrisée et exclusivité
Cette décennie de croissance n’a pas reposé sur la surproduction, mais sur une expansion réfléchie. Ferrari a su conquérir de nouveaux marchés sans dénaturer son positionnement. Le lancement du Purosangue, premier SUV de la marque, en est un bon exemple car il a permis d’élargir la clientèle sans compromettre le prestige.
Par ailleurs, on apprécie le choix de Ferrari d’avoir limité son exposition à la Chine (~10% en 2023) alors que la plupart des autres constructeurs s’y sont brûlés les ailes, à commencer par Porsche.

Répartition Géographique en 2024
CMD 2025 : Pit-Stop avant de repartir ?
L’année 2025 s’annonce comme une année de transition pour Ferrari pour 3 raisons principales :
Les hausses de prix aux États-Unis pour compenser les droits de douane instaurés par l’administration Trump
Le lancement de la première voiture 100 % électrique, l’Electtrica
Et la présentation de sa feuille de route pour 2030
Mais avec une valorisation qui dépassait les 47 fois les bénéfices avant l’événement, les attentes étaient très élevées. Le marché espérait un message fort, capable de justifier ces multiples records.

PER de Ferrari - Koyfin
Perspectives : une approche trop prudente ? 👀
Sur le plan financier, les nouveaux objectifs présentés par Ferrari pour 2030 ont surpris par leur prudence. L’entreprise italienne anticipe une croissance annuelle moyenne de 5% du chiffre d’affaires et de 6% du bénéfice par action d’ici 2030, des niveaux bien inférieurs aux attentes du marché, qui tablaient respectivement sur 6,5% et 9%.
Difficile, dans ces conditions, de justifier une valorisation supérieure à 47 fois les bénéfices, surtout pour une entreprise qui avait habitué les investisseurs à un rythme de croissance plus dynamique.
Cela dit, cette prudence n’est pas nouvelle. Le management de Ferrari applique depuis des années une stratégie de Beat & Raise.
⚡️ DEFINITION
Le Beat & Raise signifie que le management adopte des prévisions prudentes, dans le but de pouvoir les relever par la suite et ainsi surprendre positivement le marché.
Mais cette stratégie a aussi un revers. Les analystes, habitués à cette retenue, intègrent déjà des hypothèses plus ambitieuses dans leurs modèles. Par conséquent, même lorsque Ferrari “bat” ses propres objectifs, le marché peut malgré tout se montrer déçu si les attentes officieuses étaient plus élevées.
Cette mécanique explique en partie la réaction négative des investisseurs à la suite du CMD. D’autant que le plan présenté par le management ne donne qu’un plancher de performance, sans fournir de fourchette cible. En clair, le scénario communiqué correspond davantage à un cas défavorable qu’à une moyenne réaliste.
Ferrari table ainsi sur une croissance très limitée du nombre de véhicules livrés, une marge opérationnelle qui n’atteindrait que 30% à horizon 2030 (contre environ 28% aujourd’hui) et un taux de personnalisation qui progresserait peu.
Des hypothèses conservatrices, qui peinent à convaincre, d’autant plus qu’elles contrastent avec la trajectoire récente du groupe.
Le précédent du CMD 2022
Néanmoins, pour mémoire, le précédent Capital Market Day de 2022 illustrait déjà cette prudence excessive.
Le management visait à l’époque un chiffre d’affaires de 6,7 milliards d’euros en 2026. Or, cet objectif a été atteint dès 2024, avec deux ans d’avance donc.
Même constat du côté des marges. Ferrari se situera vraisemblablement dans la fourchette haute de ses prévisions dès 2025, avec une marge opérationnelle supérieure à 29%. Quant au bénéfice par action, la marque visait entre 7,2 et 8€ pour 2026, un niveau dépassé en 2024, avec 8,5€ par action.
Compte tenu de cet historique, il paraît logique de penser que le CMD 2025 suit la même logique avec des objectifs volontairement conservateurs, qui seront probablement relevés au fur et à mesure.
D’autant que plusieurs signaux demeurent positifs :
la transition électrique, désormais plus maîtrisée et moins risquée qu’anticipé (nous en parlons plus bas),
une maitrise des dépenses d’investissement (Capex) qui laisse espérer une hausse du Free Cash Flow,
la montée du taux de personnalisation, qui continue de tirer les marges vers le haut,
et surtout, une désirabilité intacte, qui reste l’essence du modèle Ferrari.

⚡️ Électrique : retour en arrière ?
Sur le front de l’électrification, Ferrari bénéficie d’un cadre réglementaire particulièrement favorable. Ce que l’on appelle “l’amendement Ferrari” permet aux constructeurs de supercars et d’ultra-luxe, comme Lamborghini, Bugatti ou Rolls-Royce, d’échapper temporairement aux objectifs stricts de réduction des émissions fixés par l’Union européenne.
En clair, avec ses volumes de production très faibles, Ferrari n’est pas contrainte d’accélérer sa transition électrique.
Pourtant, dès 2022, la direction avait choisi d’aller plus loin, en visant 40% de ventes électriques à horizon 2030. L’objectif était de prouver que performance et électrification pouvaient coexister sans trahir l’ADN de la marque.
Mais depuis, le marché a changé de ton. Plusieurs concurrents ont repoussé leurs ambitions. Aston Martin vise désormais 2030 pour son premier modèle 100% électrique, Lamborghini 2029, et Ferrari reconnaît elle aussi que le marché des voitures de sport électriques reste immature. Entre le coût de production, les contraintes technologiques et le risque de diluer l’expérience client propre à Ferrari, la transition s’annonce plus délicate qu’initialement envisagée.
Ainsi, lors de ce CMD, Ferrari a revu ses ambitions à la baisse, tablant désormais sur une part de l’électrique autour de 20%, contre 40% initialement prévu en 2022. Cette révision s’explique par une approche pragmatique, visant à privilégier la production d’un véhicule électrique à faible volume mais à forte rentabilité, tout en respectant son engagement environnemental.

Cette stratégie permettra davantage de conserver l’ADN de Ferrari, qui repose sur l’exclusivité et la rentabilité, et laisse à la marque le temps d’ajuster ses innovations face aux attentes fluctuantes du marché des véhicules électriques.
Concernant l’Electtrica, il faudra patienter jusqu’au printemps pour découvrir le premier véhicule électrique de Ferrari, capable d’abattre 100 km/h en seulement 2,5 secondes, doté d’une puissance de 1 000 chevaux et offrant une autonomie de 530 km. En ce qui concerne le prix, il reste difficile à confirmer, mais les estimations tournent autour de 500 000€.
En tout cas, une chose est certaine : les principaux concernés par Ferrari ne semblent pas vraiment convaincus par la nouvelle Electtrica lorsqu’on leur demande leur avis 👇
Toujours un acteur de qualité malgré la déception 💎
De notre côté, nous aimons dézoomer, puisque dans ce genre d’événements, la véritable déception provient avant tout de ces messages prudents, mais pas tellement des fondamentaux du dossier.
Car, en effet, Ferrari demeure un dossier d’exception pour de nombreuses raisons 👇
Un carnet de commandes dépassant 2027, assurant une forte visibilité sur les ventes.
Une exposition limitée au marché chinois (~10% des ventes), ce qui réduit les risques géopolitiques 🇨🇳
Un pouvoir de fixation des prix remarquable, illustré par une marge opérationnelle de 29% 💎
Une clientèle très fidèle, avec 48% des propriétaires détenant au moins deux Ferrari.
Une nouvelle usine à Maranello, qui optimise les coûts de production et renforce la compétitivité 🇮🇹
Une absence totale de publicité traditionnelle, Ferrari s’appuyant exclusivement sur son image en Formule 1.
Des leviers de croissance importants, notamment grâce au sponsoring et à l’événementiel.
Un actionnariat de référence qui vise le long-terme avec la famille Agnelli et Piero Ferrari (fils de Enzo Ferrari)
Conclusion
Depuis son introduction en Bourse en 2016, Ferrari a rarement connu de véritables coups de frein. Le titre a bien traversé quelques zones de turbulence, mais les corrections de plus de 30% se comptent sur les doigts d’une main (5 exactement), soit environ une tous les deux ans. Autant dire que chaque repli attire inévitablement l’attention des investisseurs long terme.

Cours de bourse vs bénéfices
Jusqu’ici, la bonne réaction était souvent la même, profiter de la baisse pour renforcer sa position sur une valeur exceptionnelle. Mais cette fois, le doute s’invite dans l’équation. La déception sur la trajectoire électrique, combinée à une valorisation toujours exigeante, autour de 40 fois les bénéfices, pousse certains à se demander si le marché ne commence pas à réévaluer les perspectives du constructeur.

PER de Ferrari
Après, il faut être honnête, dans chaque baisse importante, Monsieur Marché arrive à nous faire douter, peu importe la qualité du dossier.
Car la réalité, c’est que Ferrari d’aujourd’hui n’a plus grand-chose à voir avec l’entreprise de 2016. En une décennie, la marque a doublé sa marge opérationnelle, diversifié ses sources de revenus, rajeuni et élargi sa clientèle, tout en réalisant des investissements considérables pour préparer l’ère de l’électrification. Le rendement sur capitaux investis est passé de 15% à 25%, preuve d’une discipline financière exemplaire.
Alors oui, le marché sanctionne des ambitions jugées trop prudentes. Mais au fond, Ferrari reste Ferrari : une entreprise qui avance à son rythme, guidée non pas par la pression des investisseurs, mais par une vision long terme où la rareté et le prestige demeurent les véritables objectifs du management.
Et vous, que retenez-vous de ce CMD ? A-t-il changé votre regard sur Ferrari ?
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