Au revoir, Buffett.

#101 Synthèse de la dernière AG de Berkshire présidée par Warren Buffett

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Loris, Xavier & Abdallah

Au revoir, Buffett.

Le samedi 3 mai 2025, plus de 40 000 actionnaires de Berkshire Hathaway se sont retrouvés à Omaha pour vivre un moment historique : la dernière assemblée générale annuelle présidée par Warren Buffett, l’icône de l’investissement âgé de 94 ans.

Surnommé l’Oracle d’Omaha, Buffett a transformé en soixante ans une ancienne entreprise textile en un conglomérat tentaculaire, avec 189 filiales dans des secteurs aussi variés que l’assurance, les chemins de fer ou encore les confiseries. Sans oublier un portefeuille d’actions coté de premier plan.

Portefeuille de Berkshire - T1 2025

Chaque année, cette assemblée, surnommée le Woodstock du capitalisme attire des milliers de participants venus du monde entier, curieux d’écouter les enseignements de Buffett et de son cercle rapproché. Mais l’édition 2025 a une saveur toute particulière, marquée à la fois par l’annonce surprise de la retraite prochaine de Buffett et par la solidité financière impressionnante de Berkshire Hathaway.

Après près de 5 heures de questions-réponses, Buffett offre à son public un dernier moment fort, mêlant humour, lucidité et leçons intemporelles sur l’investissement, l’économie et l’avenir du groupe.

Dans cette newsletter, nous vous proposons une synthèse des éléments à retenir de cette ultime assemblée générale présidée par Warren Buffett. Si tu souhaites l’écouter dans son intégralité, en anglais, voici le lien vers la vidéo YouTube ⤵️

La succession surprise de Warren Buffett : Greg Abel aux commandes

La conclusion de cette assemblée 2025 a été marquée par une annonce aussi émouvante qu’inattendue.

Warren Buffett a dévoilé qu’il quitterait ses fonctions de directeur général à la fin de l’année, recommandant officiellement Greg Abel, jusqu’ici vice-président en charge des activités non-assurances, pour lui succéder .

Je pense que le moment est venu pour Greg de devenir directeur général de la société au 31 décembre.

Warren Buffett

En faisant cette annonce, Warren Buffett a pris de court la majorité des administrateurs et Abel lui-même, qui ignorait tout de cette décision. Seuls Howard et Susie Buffett, les deux enfants de Warren siégeant au conseil, avaient été prévenus en amont.

Fidèle à son style humble, l’oracle a choisi d’annoncer la nouvelle en toute fin de séance, sans accepter de questions sur le sujet, laissant l’assistance d’abord stupéfaite puis debout pour une ovation prolongée en l’honneur de ses 60 ans à la tête de Berkshire Hathaway.

Greg Abel, 62 ans, nommé de longue date comme dauphin, s’est dit “honoré et extrêmement humble” à l’idée de prendre les rênes de Berkshire Hathaway.

Greg Abel, prochain CEO de Berkshire Hathaway

Canadien d’origine, cet homme de l’ombre dirige déjà avec succès les filiales industrielles et énergétiques du groupe depuis 2018, et a été publiquement désigné successeur dès 2021. Il héritera d’une entreprise au palmarès exceptionnel : sous la houlette de Buffett, l’action Berkshire a affiché un rendement annuel composé d’environ 19,9% depuis 1965, soit presque le double du S&P 500 sur la même période (10,4%).

Conscient de l’ampleur de la tâche, Abel pourra compter sur l’appui du vétéran. En effet, Buffett restera présent à la présidence du conseil d’administration, du moins dans un premier temps, afin d’assurer une transition en douceur.

Je n’ai pas l’intention de vendre une seule action Berkshire Hathaway. Je finirai par les donner.

Warren Buffett

L’oracle d’Omaha a aussi souligné qu’il conserverait 100 % de sa participation en signe de confiance en l’avenir.

Cette décision de garder chaque action est économique, car je pense que les perspectives de Berkshire seront meilleures sous la direction de Greg que sous la mienne.

Warren Buffett

Cette transition était attendue un jour ou l’autre, mais la façon dont elle s’est déroulée est très fidèle au style de Buffett. À 94 ans, celui-ci avait toujours martelé ne jamais vouloir prendre sa retraite, laissant entendre qu’Abel ne prendrait les commandes qu’après sa disparition.

Finalement, Buffett aura préféré passer la main de son vivant, à son rythme et sur ses propres termes.

Pour Berkshire, l’enjeu des prochaines années sera de prouver que l’après-Buffett peut préserver le modèle unique et la culture d’entreprise patiemment instaurés par Warren et son défunt associé, Charlie Munger. Abel a déjà repris une partie de l’allocation du capital depuis un an et s’occupe de la majorité des filiales opérationnelles, tandis qu’Ajit Jain continuera de superviser le vaste pôle assurances.

Ajit Jain au côté de Warren Buffett

Howard Buffett, l’un des fils du patriarche, devrait à terme être nommé président non-exécutif afin de veiller au respect des valeurs “de la maison”. Toutes ces dispositions visent à rassurer les actionnaires quant à la continuité du modèle Berkshire.

Performances en hausse et trésor de guerre record

Sur le plan financier, Berkshire Hathaway est arrivé à cette assemblée 2025 avec des résultats solides et une position de trésorerie jamais vue. En effet, à l’issue du premier trimestre 2025, la société affichait 347,7 milliards $ de cash, un nouveau record absolu, en hausse de 13,5 milliards par rapport à fin 2024.

Cette accumulation de liquidités, fruit d’une décennie de prudence et de ventes nettes d’actions, alimente les débats : signe de sagesse face à des marchés incertains ou occasion manquée d’investir ?

Buffett a tenu à dédramatiser cette montagne d’argent : si elle grossit, c’est faute d’opportunités au bon prix et non par intention délibérée d’épargner.

Je saisirais volontiers la bonne affaire à 20 milliards, voire 100 milliards, si elle se présentait, une entreprise ou un actif que nous serions heureux de détenir à long terme.

Warren Buffett

En d’autres termes, ce n’est ni par pessimisme ni par altruisme envers son successeur que Buffett a laissé gonfler le bas de laine de Berkshire. Son seul mot d’ordre : ne jamais forcer les investissements.

Buffett préfère même que Berkshire ne garde “que” 50 milliards en caisse si suffisamment de bonnes affaires existaient, mais il juge que dilapider 50 milliards chaque année systématiquement serait “la chose la plus stupide au monde” car les opportunités de qualité sont par nature rares et imprévisibles.

Cette discipline patiente s’est avérée payante dans le contexte récent. Alors que l’année 2025 a débuté par des turbulences boursières, l’action Berkshire Hathaway a remarquablement surperformé le marché. Depuis janvier, le titre a grimpé de plus de 13% (malgré la baisse qui a suivi l’annonce du départ de Buffett), alors que l’indice S&P 500 reculait dans le même temps de quelques pourcents.

Du côté de son portefeuille coté, Berkshire a continué de dégraisser certaines positions aux valorisations jugées élevées.

Le fait le plus marquant est la réduction de sa participation dans Apple en 2024, en vendant près des deux tiers de ses actions du géant technologique. Cette cession a contribué largement à l’augmentation de la trésorerie. Pour autant, Buffett reste un admirateur assumé d’Apple et de son patron Tim Cook (présent dans le public lors de l’AG) qu’il a publiquement salué pour sa gestion exemplaire.

Outre Apple, Berkshire s’est montré vendeur net d’actions depuis 10 trimestres consécutifs , profitant de valorisations élevées pour prendre ses bénéfices.

Buffett n’est plus un acheteur net d’actions depuis 2022

Au total sur 2024, le groupe a cédé pour 134 milliards $ d’actions de plus qu’il n’en a achetées, du jamais vu dans son histoire récente.

Et puis, si l’on regarde les rachats de ses propres actions, il n’a procédé à aucun rachat depuis mai 2024 , alors qu’il l’avait fait de manière significative les années précédentes.

Pourquoi cela ?

La raison est simple : avec le cours de Berkshire en forte hausse, l’action ne remplissait plus le critère de sous-évaluation fixé par Buffett pour justifier les rachats. Là encore, la discipline l’a emporté, au grand dam de certains investisseurs qui auraient souhaité voir Berkshire profiter de son cash pour diminuer le nombre de titres en circulation.

Mais difficile de faire changer Warren Buffett qui s’est toujours montré réticent à surpayer, que ce soit pour acquérir des entreprises, des actions cotées ou ses propres actions.

Questions-réponses : de GEICO aux défis économiques mondiaux

La très attendue séance de Q&A (questions and answers) a permis d’aborder de nombreux sujets, illustrant à la fois la dimension tentaculaire de Berkshire et la vision du monde de son dirigeant.

Aux côtés de Buffett sur scène, Greg Abel et Ajit Jain ont également pris la parole pour répondre aux questions liées à leurs domaines.

Geico : la machine à cash de Berkshire

Parmi les sujets concrets abordés, l’assurance automobile GEICO, l’une des plus grandes filiales de Berkshire, a retenu l’attention.

Depuis quelques années, GEICO traversait une passe difficile, notamment en prenant du retard sur ses concurrents en matière de tarification et de technologies.

Interrogé à ce propos, Ajit Jain, le responsable des opérations d’assurance, a dressé un bilan très positif du redressement en cours. Il a expliqué que GEICO a fait des “progrès fulgurants” pour moderniser ses outils informatiques et mieux tarifer le risque client, notamment grâce aux données de conduite embarquées.

Les effets se font sentir dans les comptes. « Sur les sept derniers trimestres, GEICO affiche un ratio combiné avec un chiffre commençant par 8. Je n’aurais jamais pensé voir cela de mon vivant » a souligné Jain, soulignant l’excellent niveau de profitabilité retrouvé par l’assureur.

💡 Pour rappel, un ratio combiné inférieur à 100% indique que l’assureur est rentable. Un ratio dans les 80% est très bon.

Geico est sûrement la plus belle réussite de Berkshire

Buffett a renchéri en illustrant la success story de GEICO sur le long terme : Berkshire avait payé 50 millions $ en 1976 pour acquérir la moitié de GEICO, et rien qu’au premier trimestre 2025, cette compagnie d’assurance automobile a généré 2 milliards $ de bénéfices – dont 1 milliard $ revenant à Berkshire pour sa part – soit 20 fois le montant investi initialement, en seulement trois mois !

Mieux encore, grâce à sa rentabilité, GEICO fournit aujourd’hui à Berkshire 29 milliards $ de “float”, ces réserves d’assurance investissables gratuitement, que Buffett peut déployer à sa guise.

Buffett commente l’actualité

Bien sûr, aucune assemblée de Berkshire ne serait complète sans que Buffett partage sa lecture de l’économie et des politiques publiques.

Par conséquent, il a abordé deux sujets sensibles : le commerce international et les déficits budgétaires des États-Unis.

Tarifs douaniers

Concernant la guerre commerciale et les droits de douane imposés par l’administration américaine, Warren Buffett s’est montré catégorique 👇️ 

Un commerce équilibré profite au monde entier, et le commerce ne devrait jamais être utilisé comme une arme.

[…]

Il n’est pas judicieux de penser qu’un monde où certains pays pourraient clamer “nous avons gagné” est souhaitable. Au contraire, je crois que plus le reste du monde prospère, plus nous prospérerons nous-mêmes.

Warren Buffett

Warren Buffett critique ainsi ouvertement la politique commerciale agressive de l’administration Trump à l’égard de ses partenaires, plaidant pour une approche plus coopérative et mutuellement bénéfique.

Déficit américain

Sur le déficit public américain, l’oracle d’Omaha a également exprimé son inquiétude, rappelant qu’il juge la trajectoire de la dette fédérale insoutenable sur le très long terme.

Interrogé sur les efforts annoncés pour réduire les dépenses publiques aux Etats-Unis, Buffett a esquivé le volet politique pour se concentrer sur le fond : réduire le déficit sera un travail “difficile mais nécessaire” pour les États-Unis.

Malgré ces avertissements, Buffett a tenu à rassurer sur sa vision d’ensemble : il reste profondément optimiste sur l’avenir à long terme des États-Unis et de Berkshire.

Pour finir, il se considère extrêmement chanceux d’être Américain et estime que le système américain, avec tous ses défauts, reste l’un des meilleurs environnements pour entreprendre et prospérer. “On est tous plutôt chanceux” a-t-il résumé simplement.

C’est aussi ce message d’optimisme raisonné, typique de Buffett, que nous retenons.

L’héritage de Warren Buffett

En filigrane de cette assemblée générale pas tout à fait comme les autres se pose la question de l’héritage de Warren Buffett. Comment résumer l’impact de celui qui aura dirigé Berkshire Hathaway pendant 60 ans, et influencé des générations d’investisseurs par sa philosophie ?

D’un point de vue financier, les chiffres parlent d’eux-mêmes : une action Berkshire achetée à l’arrivée de Buffett en 1965 vaut aujourd’hui près de 3 millions de dollars (pour les actions de classe A) et la capitalisation boursière de la société dépasse 700 milliards $.

Au-delà des chiffres, l’héritage de Buffett est aussi humain et culturel. Il a popularisé une vision optimiste du capitalisme où l’intégrité et la patience l’emportent sur la spéculation effrénée. À 94 ans, toujours vif d’esprit, il reste l’un des milliardaires les plus admirés. De nombreux hommages venus de personnalités influentes de la finance ont été rendus, dont celui de Jamie Dimon, le PDG de J.P. Morgan 👇️ 

Warren Buffett représente tout ce qu'il y a de bon dans le capitalisme américain et dans l'Amérique elle-même : il investit dans la croissance de notre pays et de ses entreprises avec intégrité, optimisme et bon sens.

J'ai beaucoup appris de lui jusqu'à aujourd'hui, et je suis honoré de le considérer comme un ami.

Jamie Dimon

Jamie Dimon - PDG de J.P. Morgan

Conclusion

La dernière réunion présidée par Buffett s’est donc achevée sur un mélange de célébration et d’adieux et certains médias financiers ont déjà titré “C’est la fin d’une époque”.

Fidèle à lui-même, Warren Buffett n’a montré aucune nostalgie. Jusqu’au bout, il aura transmis des leçons de bon sens, évoqué des perspectives pour le futur sous Abel et même plaisanté sur la mort.

Chez Bourseko, Warren Buffett est une source d’inspiration importante. Nous en parlions d’ailleurs dans un épisode de notre podcast Bourseko MOAT.

Ce que nous retenons de lui, c’est son style de gestion frugal et patient ainsi que ses leçons intemporels :

  1. investir dans ce qu’on comprend

  2. considérer les actions comme des parts d’un vrai business

  3. être cupide quand les autres ont peur.

Merci Monsieur Buffett pour ces 60 années de leçons, d’intégrité et d’humilité.

On arrive à la fin de cette newsletter.

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